YouTube. Le 1er décembre sur YouTube, sonne l’arrivée des traditionnels premiers vlogmas. Mais cette année, il se pourrait bien que vous soyez attiré par un autre contenu, qui n’a rien à voir avec la magie de Noël. Le 1er décembre, c’est également le jour choisi par le vidéaste Gaspard G, pour présenter son second documentaire de l’année, sur sa chaîne. Après avoir proposé une immersion en Ukraine, en plein milieu du conflit, le créateur de contenu et son équipe ont décidé d’évoquer un second sujet politique et sanitaire: la chlordécone en Martinique. Son documentaire a été baptisé « L’affaire chlordécone, un scandale d’État ».
« J’ai l’ambition depuis quelques années, de créer des vidéos autour de l’actualité politique et société à destination, des 18-35 ans, pour mieux les aider à comprendre le monde qui les entoure », confie au site Les Gens d’Internet, Gaspard G. Ce nouveau reportage auto-financé s’inscrit pleinement dans cette volonté. Et pour approfondir davantage les échanges avec sa communauté, le YouTubeur a proposé une projection en avant-première dans un cinéma parisien la veille de sa sortie, avec une conférence. L’événement a fait salle comble. Un bon lancement, avant l’arrivée de la production sur YouTube, ce 1er décembre.
La chlordécone, quand un sujet « pas très sexy » arrive sur YouTube
La question que l’on peut rapidement se poser, c’est pourquoi avoir choisi de parler du sujet de la Chlordécone. Gaspard G nous confie que son envie d’en connaître davantage sur cette crise sanitaire est apparue à la suite d’une lecture de la BD « Tropique toxique » de Jessica Oublié. « Je me suis intéressé à ce roman graphique, autour d’un mystérieux produit. J’en avais vaguement entendu parler, mais je n’étais pas très au clair sur ce que ça impliquait. Et je n’ai pas pu refermer la BD« , se souvient le vidéaste. Ce qui lui a plu est ce mélange entre crise sanitaire et magouilles politiques. À la fin de l’été, il se lance donc dans une recherche plus approfondie.
À la suite de cette lecture, avec son équipe, ils se plongent dans une enquête de trois mois pour écrire ce documentaire. Ils se rendent compte que cette crise sanitaire débute en 1952, que dans les années 70, des ouvriers sont contaminés, qu’il y a eu des décisions politiques prises en ne se souciant pas de la santé des uns et des autres et que la chlordécone devient un produit interdit en France en 1993.
Avec tous ces éléments et convaincus de l’intérêt de l’enquête, ils s’envolent ensuite en Martinique dans le courant du mois de septembre, durant une semaine, pour filmer l’ensemble des images. « C’est quelque chose d’assez chouette et stimulant de travailler sur un sujet sur le long terme. Il y a une adrénaline de dingue quand on fait du terrain également, surtout lorsque l’on va chercher des interviews exclusives de lobbyistes, d’élus politiques ou encore de travailleurs. Je trouve hyper intéressant d’être à la source de l’information », se réjouit Gaspard G. Sur place, ils rencontrent des ouvriers contaminés, un lobbyiste, des médecins ou encore un politique. L’ensemble de ces interviewés apparaissent dans le film.
Quand les codes YouTube entrent en jeu
Le sujet est loin d’être le plus sexy, Gaspard G en est conscient. C’est pour cette raison, mais pas seulement, qu’il a réfléchi à une écriture différente des documentaires traditionnels. L’objectif est de pouvoir intéresser le plus grand nombre. « J’ai décidé de prendre le prisme du jeune homme que je suis. Je ne suis pas un journaliste, je ne suis pas un spécialiste. J’ai ce regard candide pour faire en sorte que chacun puisse entrer dans le documentaire grâce à ce gars qui s’intéresse à ces sujets. On réexplique beaucoup de termes avec plein de pédagogie. On reprend des codes de la fiction avec de la musique, pas celle que l’on entend sur TF1, mais sur Netflix. On essaie d’avoir un produit assez unique. C’est une nouvelle forme de documentaire et une nouvelle tonalité », nous indique le YouTubeur. Durant les 40 minutes du film, les séquences s’enchaînent au rythme soutenu que l’on connaît sur YouTube. Les face caméras s’intercalent entre les plans des interviews, les images d’archives ou encore les plans de coupe.
Au-delà de l’écriture, Gaspard G a tenu à ce que ce documentaire soit projeté en avant-première au cinéma. « C’est assez intimidant d’imaginer un projet de trois mois projeté sur un grand écran. On flippe un peu de la réaction du public, car ce n’est un sujet hyper sexy. Mais je suis reconnaissant de voir autant de personnes qui se sont intéressées au documentaire et qui ont fait le choix de venir le visionner. Ils ont payé, donc c’est un autre style de pression », sourit Gaspard G. L’ensemble des places ont été vendus en l’espace de quelques jours. Le soir de la projection, le débat a été animé, preuve que le sujet intéresse.
Pour la suite, Gaspard G espère pouvoir continuer de tourner ponctuellement des documentaires tout au long de l’année. « Il n’y a pas de sponsors, car c’est toujours un peu touchy de concilier les valeurs et le reste sur un sujet aussi sensible. On est resté dans une logique très indépendante. J’espère que ça va marcher, car il y a un enjeu financier derrière. On aura du mal à reproduire l’expérience dans l’année si les résultats ne sont pas à la hauteur », conclut-il.