TikTok. « Laissez-moi goûter votre prénom ». Oui, sur TikTok, une partie des créateurs de contenu de la plateforme ont une particularité que les autres n’ont pas. À la simple évocation d’un prénom, ils arrivent à en déduire le goût que ce mot leur procure. Ce n’est pas une énième tendance sur le réseau social un peu loufoque développée par des adolescents, il s’agit d’un réel phénomène neurologique qui prend de l’ampleur sur la plateforme.
Pour s’en rendre compte, il suffit de regarder les hashtags dédiés: #synesthesiatok ou encore #synesthesia. Le premier enregistre plus de 12 millions de vues au moment où nous écrivons ces lignes. Des comptes comme celui de Henpuffs ont fait de leur synesthésie leur ligne éditoriale. Le créateur de contenu a choisi d’en parler de manière humoristique. Il sollicite sa communauté en leur demandant de lui soumettre des prénoms. Il se filme ensuite en vidéo pour partager le goût que ce mot lui procure.
De son côté Tess Stevens préfère se concentrer sur les personnalités. Elle a ainsi pu préciser à sa communauté le « goût » de James Charles ou de Jack Harlow. L’utilisatrice n’y va pas par quatre chemins pour partager ce qu’elle ressent à l’évocation de ces personnalités. Par exemple, le premier sent « la vodka à cinq dollars dans une bouteille en plastique ». Sarah Kraning de son côté ne sent pas des odeurs, mais voit des couleurs lorsqu’on lui parle d’un prénom. D’autres TikTokeurs sont dans le même cas, si bien que des vidéos de mosaïques colorées peuvent apparaître sur votre feed pour décrire un mot.
@tessfstevens Do we like the super fast taste tests? #jackharlow was hella surprising! #firstclass #jackharlowfan #nailtech #jackharlowmeme ♬ original sound – Tess Stevens
@synaesthetic.by.avery #chromesthesia #chromesthete #chromesthesiaartist #chromesthesiaart #seeingsound #womeninmusic #synesthesia #hearingcolors #synesthesiaart #synesthesiacheck #synesthesiatok #artist #art #pinkroverpinkrover #pinkrover #pinkroverchallenge ♬ Pink Rover – Scene Queen
La synesthésie, un phénomène neurologique peu connu, sauf sur TikTok
L’ensemble de ces créateurs de contenu ne suivent pas une tendance, mais sont atteints de ce que l’on appelle la synesthésie. « On parle notamment de synesthésie lorsque la personne associe systématiquement des couleurs à des sons, à des notes de musique, au timbre d’instruments, à des voix ou à des paroles », précise Marc Gozlan dans un post de son blog pour Le Monde.
Si certains abonnés restent sceptiques quant à cette particularité (plusieurs insinuent que les TikTokeurs réalisent ce type de vidéos pour le buzz), des chercheurs ont certifié que les synesthètes existent. Il faut cependant attendre le 19e siècle pour qu’on les considère réellement. Seul souci, ce phénomène neurologique reste encore un bien grand mystère, malgré les études réalisées. « Il y a beaucoup de questions sur la synesthésie auxquelles on peut répondre avec cette certitude: on n’a aucune réponse certaine », expliquait en 2021 au Monde Jean-Michel Hupé, du Centre de recherche cerveau et cognition de l’université de Toulouse.
@sarahkraning For those asking! #SephoraLipLooks #ranking #foryourpage #synesthesia #celebrities @billieeilish #fun @Pharrell ♬ 原聲 – Cindy👄
Sur TikTok, cette visibilité autour de la synesthésie permet aux utilisateurs en souffrant, de pouvoir enfin vulgariser ce phénomène et de le faire connaître. « Quand j’étais petite, je me sentais vraiment seule. Le fait que les gens commentent et disent qu’ils se sentent vraiment entendus, c’est là que les médias sociaux sont les plus puissants », confie la TikTokeuse Sarah Kraning à Wired. En parallèle, d’autres choisissent d’en faire un véritable business. Par exemple, Henpuffs fait payer via Paypal une analyse gustative des prénoms soumis.