Influence marketing. Le 9 juin 2023, le gouvernement français a fait un grand pas dans le secteur de l’influence. Une loi pour réglementer le secteur a été votée. Les professionnels du secteur répondent désormais à plusieurs obligations. Les créateurs de contenu doivent être transparents sur leurs partenariats rémunérés en l’écrivant clairement sur leurs publications via des expressions comme « Partenariat rémunéré ou collaboration commerciale« . Ils ont également interdiction de faire la promotion de certains produits et services, comme la chirurgie esthétique ou encore les cryptomonnaies. Du côté des marques et des agences, un contrat doit être établi à chaque partenariat. Et d’autres demandes spécifiques ont été formulées pour que le secteur puisse grandir sereinement.
Mais depuis un an, a-t-on réellement vu une évolution? « Un an après l’implémentation de la loi sur les influenceurs, nous observons clairement une professionnalisation grandissante du secteur. Cette réglementation a instauré des premières normes claires, ce qui a renforcé la confiance entre les marques, les influenceurs et les consommateurs« , précise Alexis Duvernoy, cofondateur de l’agence 18h08. Cette loi vise avant tout à réglementer le consommateur, pour qu’il puisse évoluer sans aucun problème sur les réseaux sociaux.
« Autre chose qu’on entend assez peu sur la loi. Du côté influenceur, elle a permis (dans son article I) de définir et de représenter la notion d’influenceur, mais également celle de l’agent d’influenceur (Article 7). Ainsi, chacun connaît aujourd’hui son rôle et les différentes prestations réalisées sont légalement encadrées. Au yeux de la loi, ces deux fonctions sont ainsi devenues des métiers », poursuit le fondateur de l’agence.
Des évolutions concernant la loi sur les influenceurs restent à prévoir
Si la loi a été un élément déclencheur pour appeler à plus de transparence dans le secteur, il reste néanmoins plusieurs zones d’ombres. Certains aspects du texte doivent être retravaillés pour être plus explicites ou plus inclusifs, comme par exemple:
Le contrat : détaillé au sein de l’article 5, un contrat est établi pour chaque collaboration. Mais une question se pose: à partir de quel seuil l’obligation d’un contrat écrit est-elle nécessaire? « Le seuil actuel pourrait être ajusté pour être plus inclusif, permettant aux micro-influenceurs de bénéficier aussi de cette protection sans pour autant alourdir les démarches pour des collaborations plus modestes. Un seuil basé non seulement sur la rémunération mais aussi sur l’audience pourrait être envisagé pour une régulation plus équilibrée », conseille Alexis Duvernoy.
Les publicités implicites : la loi offre un cadre clair pour les placements de produits. Quid de ces éléments visuels que l’on peut apercevoir en arrière-plan? « Actuellement, ces pratiques peuvent échapper aux régulations strictes, ce qui pose un défi pour l’éthique publicitaire. Il est essentiel de développer des directives claires pour que toutes les formes de contenu sponsorisé soient facilement identifiables, assurant ainsi une consommation plus consciente et honnête ».
Le rôle du représentant pour les influenceurs étant basés hors Union Européenne: cet élément a été pensé comme essentiel pour tous les influenceurs présents à Dubaï notamment, mais il manque quelques points pour qu’il soit parfaitement appliqué. « Il serait judicieux de définir des critères stricts pour ces représentants, tels que des agences certifiées ou des juristes spécialisés, pour assurer une conformité continue et fiable. »
Les signaleurs de confiance : ce sont ces personnes qui signalent les comportements déviants sur les réseaux sociaux. « Pour 18h08, il est crucial que ce soit des entités avec une expertise vérifiable en marketing d’influence, et qu’elles soient suffisamment nombreuses pour couvrir le marché efficacement sans créer de goulets d’étranglement administratifs. »
Pour conclure, la loi a été pensée pour encadrer le secteur assez rapidement, mais des éléments sont encore à discuter pour que tous les aspects de cette industrie soit encadrée. « La loi ‘Influenceurs’ peut sembler inspirée par des éléments de la loi Avia, particulièrement en ce qui concerne la régulation des contenus. Bien que différente dans son approche, elle soulève des questions similaires sur les limites de la régulation et la protection des droits individuels », conclut Alexis Duvernoy. C’est pour cette raison que 18h08 demande à ce que les discussions se poursuivent.
Du côté des marques, ont-elles appliqué la loi ?
Les acteurs de l’industrie de la Creator Economy avait comme appréhension de voir les annonceurs détourner leur regard de l’influence à cause d’une réglementation trop stricte. Ce qui n’est en réalité pas le cas. Certains font même plus que demander. « Après la mise en application de la loi, l’un de nos clients, qui gère une grande marque de boissons, a pris très à cœur la section sur la transparence et a décidé de l’appliquer immédiatement. Lors de la première campagne post-loi, ils ont inclus un hashtag très explicite, #CeciEstUnePub, sur chaque phrase et contenus sponsorisés », se rappelle Alexis Duvernoy. Cette stratégie a beaucoup plu aux utilisateurs. Ils ont commenté en ajoutant des hashtags comme #MerciPourLaTransparence ou #AuMoinsCestClair. « Cela a non seulement augmenté l’engagement mais a aussi renforcé la confiance des consommateurs envers la marque. »
Cette manière de faire est peut-être un peu exagérée, mais avoir le réflexe d’être transparent devenait nécessaire. Pour 18h08, cette loi a permis aux annonceurs d’avoir une discipline beaucoup plus cadrée. « L’exigence de contrats écrits clairs a poussé les annonceurs à formaliser davantage leurs accords, ce qui garantit une compréhension mutuelle des attentes et des obligations. Cela a également eu pour effet de professionnaliser les échanges, rendant les campagnes plus structurées et mesurables. » Cette loi a également poussé à d’autres discussions en interne, notamment chez les marques qui ont des entités à l’international. « Les annonceurs doivent désormais s’assurer que leurs partenaires internationaux respectent la législation locale, ce qui a ajouté une couche de complexité pour les entreprises souhaitant s’exporter. »
Enfin, le dernier élément à avoir en tête concernant le Digital Services Act (DSA). Avec ces réflexions plus globales, la loi française sur les influenceurs devrait aussi évoluer. D’autres questionnement pourraient venir alimenter les discussions, comme ceux concernant l’impact social et environnemental des campagnes.